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Sommaire du dossier :

En matière de plus-values immobilières, le législateur est à la recherche d’un équilibre entre l’obligation d’augmenter les recettes fiscales, pour diminuer la dette souveraine de l’Etat, et la volonté de maintenir un marché immobilier en effervescence pouvant être vecteur de croissance économique.

Aujourd’hui, un propriétaire d’un bien immobilier se trouve partagé entre une opportunité de vendre à des conditions fiscales plus avantageuses et la menace d’un marché de l’immobilier qui ralentit. En 2013, le pessimisme est de mise reflétant d’une part, les acheteurs peu nombreux et exigeants, et d’autre part, la lente baisse des prix qui s’installe. En effet, sur un an, les prix des logements diminuent de 1,2 % en sachant que la baisse est un peu plus prononcée dans le neuf (-1,4 %) que dans l’ancien (-1,1 %). Toutefois, ce constat laisse apparaître au second trimestre 2013 que les prix des logements augmentent de 0,7 % par rapport au trimestre précédent ; ceux des logements neufs sont en hausse de 0,6 % et ceux des logements anciens de 0,7 % – source INSEE.

Dans ce contexte, le gouvernement tente de fluidifier le marché immobilier par la mise en place d’incitations fiscales en matière de cessions immobilières par une réforme nécessaire dont la présentation a été faite en juillet 2013 par le ministre du budget et dont l’application a été confirmée au 1er septembre 2013. En revanche, les modalités d’imposition, modifiées par voie doctrinale, encourent d’éventuelles modifications émanant du Parlement dont il est nécessaire de recueillir l’approbation. Ces mesures figureront dans le projet de loi de finances pour 2014.

Cette volonté de fluidifier le marché immobilier, priorité pour le législateur, s’appuie sur un régime avantageux en matière de cessions immobilières (partie I). Un régime dont l’instabilité s’accentue par de potentiels aménagements prévus par la nouvelle loi de finances. Dès lors, de nouvelles mesures devraient être prises en compte dans la gestion de patrimoine d’un détenteur de biens immobiliers (partie II). Du côté de l’investisseur, la question qui se pose est de savoir s’il faut agir aujourd’hui ou s’il faut attendre pour acquérir un bien immobilier (partie III).

I) Le régime actuel, une volonté de regain des ventes immobilières

La précédente loi de finances rectificative du 19 septembre 2011 a eu un effet néfaste sur le marché immobilier. Le législateur a réagi par une procédure innovante en instaurant une nouvelle réforme fiscale des plus-values immobilières. De plus, dans l’optique de relancer rapidement le marché immobilier, il a été instauré un avantage supplémentaire strictement encadré et ne bénéficiant qu’à certains types de cession.

A) Une réforme nécessaire

Les modalités antérieures, relatives à la plus-value immobilière, ont incité les propriétaires à garder dans leur patrimoine leurs ressources foncières, situation qui a engendré un gel des transactions immobilières. En effet, la deuxième loi de finances rectificative du 19 septembre 2011 a durci l’abattement pour durée de détention puisque le propriétaire se voyait exonéré de plus-values au bout de trente ans contre quinze auparavant.

Antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 19 septembre 2011, les propriétaires, détenant leur bien depuis plus de quinze ans, se sont empressés de vendre pour garder le bénéfice de l’exonération totale. L’annonce, de la modification de l’abattement pour durée de détention, a fortement accru les ventes mais le législateur n’avait certainement pas, à tort, imaginé l’impact négatif de sa nouvelle réforme. En effet, les propriétaires se voyaient soumis à un régime beaucoup plus lourd : en plus d’avoir une exonération totale au bout de trente ans, l’abattement progressif était un frein à la vente du fait de sa faible augmentation entre la cinquième année et la vingt-troisième année.

A titre d’exemple, un propriétaire qui a détenu son bien depuis vingt-trois ans se voyait appliquer un abattement d’environ 50 %. Il était alors préférable pour lui de détenir son bien sept années afin de pouvoir bénéficier d’une exonération totale. De plus, le législateur a eu la lumineuse idée d’instaurer une surtaxe sur les plus-values immobilières, autre que les terrains à bâtir, supérieures à 50 000 € qui amplifie le phénomène de rétention des biens par le propriétaire. Il faut noter que cette disposition est toujours en vigueur et que le législateur ne semble pas vouloir la modifier.

Ainsi, le Gouvernement a réagi par la mise en place d’une énième nouvelle réforme des plusvalues immobilières entrée en vigueur le 1er septembre 2013. Néanmoins, celle-ci doit être approuvée postérieurement par le Parlement et risque, par conséquent, d’être modifiée durant les débats, puisque plusieurs amendements sont à l’étude (partie II).

A l’heure actuelle, le taux et la cadence d’exonération diffèrent selon le calcul de l’impôt sur le revenu et celui des prélèvements sociaux. Cette innovation fiscale complexifie considérablement l’exercice du calcul de la plus-value immobilière tant pour le contribuable que pour les professionnels.

Pour la détermination du montant imposable à l’impôt sur le revenu, l’abattement est de 6% par an au-delà de la cinquième année jusqu’à la vingt et unième année, puis de 4% à la vingtdeuxième année pour une exonération totale au bout de vingt-deux ans. En revanche, concernant la détermination de l’assiette sociale, l’abattement est moins avantageux puisqu’il est de 1,65% par an au-delà de la cinquième année jusqu’à la vingt et unième année, 1,60% pour la vingt-deuxième année et 9% pour chaque année de détention audelà de la vingt-deuxième pour une exonération totale au bout de trente ans.

Il est important de préciser que cette réforme ne s’applique pas aux terrains à bâtir qui sont soumis à l’ancienne réforme entrainant une scission entre les biens immobiliers pour le calcul de la plus-value.

Dans cette volonté de dynamiser les ventes de biens immobiliers, le gouvernement a introduit une incitation fiscale provisoire.

B) Une incitation bienvenue

En août dernier, le ministère de l’Economie et des Finances a été à l’origine d’une nouvelle directive fiscale, avantageuse, sur le calcul des plus-values immobilières afin de contribuer au « choc d’offre » immobilier et de relancer le marché.

Pour les cessions intervenant entre le 1er septembre 2013 et le 31 août 2014, un abattement exceptionnel de 25 % est appliqué pour la détermination de l’assiette imposable, à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, quelle que soit l’année de détention. Cela signifie qu’une personne pourra bénéficier de cet avantage malgré une détention du bien inférieure à six ans. Une fois l’abattement exceptionnel déduit, on applique à l’assiette restante l’exonération pour durée de détention. Cette opportunité est à saisir rapidement par les propriétaires qui ont l’intention de vendre en raison de la durée limité de l’avantage supplémentaire.

Une limite matérielle s’ajoute puisque l’exonération exceptionnelle ne s’applique pas à toutes les cessions d’immeubles avec une nouvelle fois, les terrains à bâtir exclus. De même, certaines cessions d’immeubles bâtis en sont exclues pour éviter des montages ayant pour but de purger la plus-value dans des conditions fiscales favorables sans que le propriétaire ne se sépare réellement du bien. C’est la raison pour laquelle cette exonération ne s’applique pas aux cessions consenties par le cédant à un proche de sa famille (conjoint, partenaire, concubin notoire, descendant ou ascendant) ou à une personne morale dont le cédant ou l’une de ces personnes est associé.

II) Le régime actuel, potentiellement soumis à des modifications

Sachant que la réforme doit être approuvée par le parlement, il n’est pas certain qu’elle reste en l’état. On sait, par ailleurs, que le législateur modifie, parfois à tort ou à raison, les ordonnances et autres textes gouvernementaux. Durant ces dernières semaines plusieurs amendements ont été ajoutés pour la réforme des plus-values. De plus, il se pourrait qu’un vote concernant l’augmentation des droits d’enregistrement intervienne avant le 1er janvier 2014.

A) Un régime des plus-values instable

Le régime des plus-values va certainement être la cible de plusieurs modifications par les parlementaires. On a pu entendre ces dernières semaines qu’un amendement de la commission des Finances de l’Assemblée nationale suggérait de plafonner l’abattement pour durée de détention sur la part des prélèvements sociaux à vingt-deux ans. Dans ce cas, il n’y aurait aucun changement pour le calcul de l’impôt sur la plus-value de 19%. Fort heureusement, l’amendement a été retiré ce lundi 21 octobre et Monsieur Bernard Cazeneuve souhaite constituer un groupe de travail pour approfondir cette question pendant la navette parlementaire. La fin de la modification du régime d’exonération pour durée de détention n’est donc pas pour maintenant.

A l’heure actuelle, aucune réforme n’est envisagée concernant l’exonération des plus-values de ventes de terrains à bâtir. C’est une réforme qui, a notre sens, doit être débattue puisque cette situation risque d’avoir pour conséquence néfaste le ralentissement des ventes de ce type de biens.

A partir du 1er janvier 2014, l’exonération pour durée de détention est exclue pour la cession des terrains à bâtir. Les propriétaires seront alors frileux quant à la cession de leur bien puisqu’ils seront taxés sur l’intégralité de la plus-value. Sachant que par la modification d’un Plan Local d’Urbanisme, un terrain agricole peut se transformer en terrain à bâtir, la plusvalue ne sera que plus importante du fait de la différence des prix entre ces deux catégories. En effet, un terrain agricole vaut beaucoup moins qu’un terrain à bâtir. Cette situation va conduire à un gel des ventes de terrains à bâtir et seule une expropriation d’utilité publique, de la part des collectivités, va pouvoir obliger le propriétaire d’un terrain à vendre. Par conséquent, les propriétaires de terrain à bâtir n’ont plus que deux mois pour vendre leur terrain s’ils souhaitent bénéficier d’un abattement pour durée de détention sur plus-values immobilières. A notre sens, à terme, le marché de l’immobilier risque de grimper fortement du fait de l’augmentation croissante de la population en France et de la demande grandissante de logement. Il serait donc opportun que le gouvernement réfléchisse à une modification du régime des plus-values immobilières concernant les terrains à bâtir.

B) Une augmentation probable des droits d’enregistrement

Une autre modification pourrait voir le jour mais cette fois-ci du côté de l‘acquéreur d’un immeuble. En effet, les mesures entreprises dans le cadre de l’imposition des plus-values immobilières des particuliers sont, sans aucun doute, des incitations fiscales. Ce leste sur le régime des plus-values pourrait être compensé par une augmentation des droits d’enregistrement. L’emploi du conditionnel est de rigueur puisqu’il se pourrait que ces droits puissent augmenter courant 2014. En effet, la loi de finances prévoie d’autoriser les départements à remonter leur part de 3,8% à 4,5 % soit une augmentation de 0,7 % au maximum (article 58 du projet de loi de finances pour 2014).

Cette mesure concernerait les ventes d’immeubles réalisées du 1er mars 2014 au 29 février 2016, ce qui aboutirait à relever le taux global maximum de 5,09% à 5,81%, étant rappelé que ces droits sont supportés par l’acheteur. Ainsi, un frein apparaît pour l’acheteur qui se verrait supporter des charges plus lourdes dans l’acquisition d’un bien. Cependant, il faut atténuer nos propos du fait que les droits d’enregistrement sont prélevés à la source lors de l’acquisition du bien et constituent la plus grande partie des frais de notaire. L’acquéreur risque de ne pas se rendre compte directement de la hausse des droits et fera peser, à tort, la hausse sur les honoraires du notaire.

III) Investir dans l’immobilier : agir ou attendre ?

Outre le fait que les vendeurs attendront certainement l’application définitif du régime d’exonération pour durée de détention pour prendre la décision de vendre son bien, il est bon de se demander s’il est opportun d’investir maintenant dans l’immobilier ou retarder l’acquisition à de futurs modifications législatives. Nous allons mettre en exergue les avantages et les inconvénients d’une acquisition présente d’un bien immobilier.

A) Les moteurs de l’investissement immobilier

Tout d’abord, lorsque l’on raisonne en termes d’investissement immobilier, il est de rigueur de s’interroger sur le financement. Deux types de financement s’opposent à savoir l’autofinancement (fonds propres) et le recours à un établissement bancaire (fonds d’emprunt). A ce niveau, il faut mesurer le coût occasionné : d’une part, le coût de renonciation à l’épargne (autofinancement) et d’autre part, le coût du crédit octroyé. Il est important de savoir que les taux d’intérêt sont aujourd’hui à un niveau historiquement bas. En juillet 2013, le taux moyen, hors assurance, toutes durées confondues, était de 2,8 % selon l’Observatoire Crédit Logement / CSA. L’acquéreur qui a les fonds nécessaire devra se demander s’il doit renoncer au placement de son argent qui lui rapporterait plus le taux d’un d’intérêt d’un crédit ou demander un crédit immobilier en maintenant ses deniers placés sur des produits financiers.

De plus, quelle que soit la conjoncture économique, disposer d’un logement que l’on peut mettre en location, c’est se garantir des revenus complémentaires. L’acquisition d’un bien immobilier peut valablement s’inscrire dans une optimisation patrimoniale et notamment par exemple dans la perception de loyer en tant que complément de retraite.

En outre, nous l’avons vu le marché immobilier se grippe. Dans un contexte de ralentissement la baisse des prix s’installe. De ce fait, pour l’investisseur l’attractivité des prix peut être un élément déclencheur dans sa décision d’achat. Le législateur recherche un regain des ventes dans l’immobilier ce qui laisse présager une effervescence du marché. Ainsi, du fait de la possibilité mise en vente en masse des biens sur le marché, les potentiels acquéreurs pourront bénéficier, à court terme, de prix attractifs car, relativement bas et donc d’un potentiel de plus value intéressant.

Enfin, le placement immobilier doit être attaché au caractère de la sécurité de l’investissement. A long terme, la cote de l’immobilier se maintient, sous conditions que l’immeuble soit d’une part bien entretenu et d’autre part bien placé. Par conséquent, un capital important pourra être dégagé en cas de revente du bien et plus si les conditions d’exonération des plus-values sont admises.

B) Les freins de l’investissement immobilier

Les moteurs favorisant la décision d’investir doivent être nuancés par différents points que nous allons aborder.

Tout d’abord, malgré un taux d’intérêt attractif, l’accès au crédit reste difficile. Les établissements bancaires sont très encadrés quant à l’octroi d’emprunt. Relativement à leur activité de crédit, la qualité du dossier de l’emprunteur est importante : exigence de solvabilité, durées d’emprunt plus courtes et capacité d’endettement contrôlée.

De plus, l’instabilité fiscale est vectrice de confusions. En effet, les annonces gouvernementales qui se succèdent, depuis ces dernières années, rendent complexes les perspectives d’investissement. Les potentiels investisseurs sont frileux car inquiets de l’évolution législative relative aux cessions ou acquisitions de locaux d’habitation.

Enfin, le choix d’investir dans un certain bien immobilier nécessite une certaine expertise. Cette décision d’achat doit être réfléchie et ce, notamment, par rapport à l’emplacement de l’immeuble. Il s’agit là d’un critère déterminant : un bon emplacement est signe d’attractivité locative du bien et de prise de valeur (plus-value). Par exemple, un appartement au cœur du centre ville de Toulouse restera, quelle que soit la conjoncture économique, un bien prisé.

Groupe recherche – promotion 2013/2014

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