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En convenant d’une co-souscription, les contractants décident en principe de gérer ensemble le contrat et que le survivant bénéficiera de la valeur du contrat, soit en qualité de bénéficiaire de la garantie, soit en celle d’attributaire de la totalité de la valeur de rachat.
Une telle stipulation confère donc, au survivant des souscripteurs , des droits sur une valeur dont une fraction provient du patrimoine de l’autre contractant.
Pourtant, les souscripteurs ne réalisent pas en principe par cette opération une donation indirecte au profit du survivant ou du bénéficiaire.
Une telle qualification est nécessairement à exclure dans certaines hypothèses. Ainsi, elle ne peut être envisagée lorsque les parties ont rédigé une clause de tontine en vertu de laquelle le premier prédécédé sera considéré comme n’ayant jamais eu droit à la propriété du contrat d’assurance auquel il vient d’adhérer, lequel appartiendra en totalité au survivant des co souscripteurs. La clause de tontine ne peut être en effet qualifiée de libéralité en raison de son caractère aléatoire (Voir ici).
Mais la rédaction d’une stipulation tontinière est assez rare, la souscription conjointe étant essentiellement le fait de personnes mariées sous le régime de la communauté.
C’est également le cas, en principe, en l’absence de toute clause. En effet, selon la Cour de cassation,« la donation étant un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte, la cour d’appel, en retenant que la faculté de rachat dont bénéficiait chaque souscripteur pendant la durée du contrat excluait qu’il se soit dépouillé irrévocablement au sens de l’article 894 du Code civil » (Cass. 1ère, civ., 28 juin 2005, n° 03-18397).
En l’absence de dépouillement irrévocable, il ne peut y avoir de donation.
La décision de la Cour de cassation est importante car l’administration fiscale tenait une position différente. Selon une célèbre réponse ministérielle, l’administration fiscale « est fondée à apporter la preuve qu’un contrat d’assurance recouvre, dans certaines situations, une donation indirecte qui doit être assujettie aux droits de mutation à titre gratuit. Tel peut être le cas lorsqu’un contrat est souscrit par une personne (…) en adhésion conjointe avec un ou plusieurs souscripteurs dans la mesure où ceux-ci bénéficient directement ou indirectement des sommes investies » (Rép. Min. n° 5703 : JOAN Q, 20 déc. 1993, p. 4608 ; JCP N 1994, n° 17, prat. 2969). Dans une telle hypothèse, « l’assiette de la taxation est constituée par la valeur de rachat du contrat au décès du premier souscripteur assuré, sous déduction de la valeur de rachat correspondant aux primes effectivement versées par les souscripteurs donataires ».
Ce n’est que de façon exceptionnelle que la souscription conjointe peut être requalifiée en donation indirecte.
En cas de souscription conjointe avec dénouement au premier décès, la libéralité résulte de l’assurance vie. Elle ne peut donc pas être requalifiée en donation indirecte,sauf absence d’aléa en raison de l’état de santé de l’un des deux souscripteurs/assurés.
La souscription avec dénouement au second décès peut plus facilement être requalifiée en donation indirecte. Par exemple, dans l’hypothèse d’une distinction injustifiée entre les qualités de souscripteurs et d’assuré, ou lorsque les fonds ont été versés par un seul des contractants.
Cependant, si la distinction entre la personne de l’assuré et celle du souscripteur constitue un indice de l’existence d’une libéralité indirecte, elle n’est naturellement pas suffisante pour retenir cette qualification, la preuve de l’intention libérale et du dépouillement irrévocable doit être établie.

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