Pôle Patrimonial Professionnel

Une question épineuse en droit civil et fiscal est la prise en compte des contrats d’assurance vie non dénoués  dans les opérations de liquidation de la communauté et de la succession en cas de cécès de l’époux non souscripteur (sur ces questions, V. ici et ).
Le principe admis était sur le plan civil celui de la prise en compte de la valeur du contrat dans les opérations de liquidation de la communauté et de la succession, et sur le plan fiscal un principe de neutralité fiscale.
Ce principe vient d’être remise en cause par l’administration par la réponse ministérielle suivante  ([Question publiée au JO le : 01/07/2008 page : 5546, Réponse publiée au JO le : 29/06/2010 page : 7283).

Nous commenterons demain cette réponse ministérielle. En attendant voici une remise en perspective.

En principe, lorsqu’au moment de la dissolution du régime matrimonial du souscripteur, le contrat n’est pas dénoué , à la condition bien évidemment que sa valeur soit commune, celle-ci est prise en compte dans la masse commune et donc dans les opérations de liquidation.

L’intégration de la valeur de rachat dans l’actif de la communauté devrait avoir également  pour conséquence nécessaire, en cas de dissolution pour cause de décès de l’époux non souscripteur, l’intégration dans l’assiette fiscale des droits de succession de la moitié de la valeur du contrat.
Cependant , dès juillet 1999, l’administration fiscale a rejeté cette conséquence :
A cette date, par une lettre de D. Strauss-Kahn adressée au président de la FFSA, celui-ci « décide d’instaurer la neutralité fiscale entre les contrats d’assurance vie souscrits à l’aide de deniers communs par l’un quelconque des époux au profit de son conjoint indépendamment de leur date de décès et de l’ordre des décès entre les époux.
»
Cette décision a été par la suite explicitée et réaffirmée par diverses réponses ministérielles, dont en particulier une célèbre réponse ministérielle dite  Marsaudon (Rép.min.à QE n° 55265,Marsaudon JOAN Q, 19 novembre  2001), selon laquelle :« Il résulte de la doctrine actuelle que la valeur de rachat d’un contrat d’assurance -vie souscrit par des époux à l’aide de biens communs et non dénoué lors de la liquidation d’une communauté conjugale à la suite du décès de l’époux bénéficiaire du contrat n’est pas soumise aux droits de succession dans les conditions de droit commun lorsque les héritiers n’ont pas intégré ces contrats d’assurance dans l’actif successoral »).
Il semblait résulter de cette position que la taxation dépendait du choix opéré par les héritiers, choix qui naturellement n’existe pas en réalité. En effet, comme l’a fort bien rappelé une Cour d’appel (Paris,5 févr. 2004,n° 02-/15105, RFN, 2005, n° 8, 24 février, commentaire 235, p. 469), « Dans un système de déclaration contrôlée, la liberté de choix ne peut être opposée au déclarant que si ce dernier dispose d’options entre différentes qualifications.
Tel n’est pas le cas en l’espèce, dès lors que dans l’hypothèse du prédécès du conjoint bénéficiaire du contrat d’assurance-vie, commun en biens, la transposition au plan fiscal de la doctrine de l’arrêt « Praslicka » ne permettait de retenir pour ces contrats que la qualification de biens communs
».
La réponse ministérielle proriol déjà commentée ici confirmait que la valeur du contrat non dénoué était un bien commun, exclu cependant de l’assiette taxable.

La réponse ministérielle que nous commenterons demain revient sur cette analyse :

Cette tolérance doctrinale avait une portée exclusivement fiscale. Désormais, compte tenu des modifications intervenues sur le plan fiscal en matière successorale dans le cadre de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, et notamment de l’exonération de droits de succession au profit du conjoint survivant résultant de cette loi, cette tolérance doctrinale est devenue sans objet

Fermer