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L’exercice de la faculté de renonciation constitue-t-elle vraiment un acte d’administration ?
Rappelons que constituent des actes d’administration du patrimoine des personnes vulnérables, les actes relatifs à la gestion courante de ce patrimoine (C. civ., art. 496).
Le contenu de cette catégorie d’actes est fixé par le décret précité du 22 décembre 2008 (et en particulier par ses annexes).
Celui-ci, au préalable, approfondi la définition d’acte d’administration : « Constituent des actes d’administration les actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée dénués de risque anormal ».

Par opposition, les actes de disposition sont ceux qui engagent le patrimoine de manière durable et substantielle (C. civ., art. 496). « Constituent des actes de disposition les actes qui engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». (D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, préc., art. 2, al. 1.)

Sans doute la demande portée  pendant le délai de trente jours calendaires révolus à compter de l’information sur la conclusion du  contrat (C. assur., art. L. 132-5-1) est un acte d’administration.

En effet,  le contrat n’a pas encore produit d’effets ou  si peu que l’exercice de la renonciation n’a pas de conséquence sur la structure du patrimoine.  L’exercice de cette faculté dans les trente premiers jours du contrat ne présente donc  aucune gravité particulière.

Cependant c’est la qualification de l’exercice de la faculté prorogée de renonciation, en raison de ses enjeux financiers et de son contexte, qui est au cœur des difficultés.

L’exercice de la faculté prorogée de renonciation au contrat d’assurance-vie peut-elle sembler, de prime abord, relever de la qualification d’acte de disposition.
D’une part, elle fait disparaître les droits du souscripteur sur le contrat et met fin à une stratégie de capitalisation financière.

Elle emporte par conséquent « une modification importante de son contenu », ainsi qu’ « une altération durable des prérogatives de son titulaire ».
D’autre part, la souscription du contrat d’assurance-vie relevant de la catégorie des actes de disposition (C. assur, art. L. 132-4-1), l’acte ayant pour effet sa disparition pourrait revêtir la même qualification.
Enfin,  le rachat est, sans doute possible, un acte de disposition (C. assur, art. L. 132-4-1 et annexe 1, décret 22 déc. 2008 préc.).
Or cette opération n’est pas sans rapport avec la renonciation puisqu’elle partage avec cette dernière un effet commun : ce sont deux opérations qui entrainent le remboursement des primes versées (total dans un cas, d’un montant déterminé par la valeur du contrat et l’importance du rachat, dans l’autre).

Cependant, la qualification d’acte d’administration, retenue par la Cour de cassation, se justifie pleinement.

 

  • Tout d’abord,  l’exercice de la faculté prorogée de renonciation est en pratique un acte dénué de « risque anormal » pour le patrimoine de l’incapable : puisque son effet est, par rapport à aux fonds investis dans le contrat,  de le  replacer financièrement dans l’état où il se trouvait avec la conclusion du contrat. Il ne subit donc que la perte de pouvoir d’achat liée à l’inflation.
  • De plus, en pratique cette faculté n’étant mise en œuvre que lorsque le contrat est en moins-value, son exercice a donc pour effet mécanique d’accroître la valeur du patrimoine du renonçant, constatée au moment de son exercice. En effet, la renonciation entraîne l’obligation pour l’assureur de restituer l’ensemble des primes versées. Pour cette raison, l’acte  n’est pas abdicatif, à la différence des renonciations qualifiées par le décret du 22 décembre 2008 comme des actes de disposition.

La qualification de l’acte étant déterminée par l’importance de l’atteinte  au patrimoine géré, la renonciation relève bien de la catégorie des actes d’administration.

  • Enfin, la comparaison de la renonciation et du rachat est trompeuse. Le rachat est une modalité d’exécution du contrat (ou constitutif d’une résiliation pour le rachat total), alors que la renonciation est une sanction de l’inexécution par l’assureur de ses obligations pré contractuelles. En d’autres termes, en rachetant le souscripteur n’enrichit pas son patrimoine, alors que la restitution des primes perdues produit cet effet.

Il n’est donc pas possible de déduire la nature de la renonciation de la qualification du rachat.

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